Météore de Verdun – 7 octobre, 20h23
En début de soirée du 7 octobre, à 20h 23min (heure locale française, soit 18h 23min TU), un bolide* très long et très lent a été observé depuis l’Est de la France par plus de 350 témoins (Figure 3). Il a également été enregistré par 7 caméras Fripon (Figures 1) et des caméras du réseau BOAM (Figure 2) . Si vous l’avez également observé, n’hésitez pas à envoyer un rapport d’observation en ligne !
Ce bolide a pu donner lieu à une chute de météorites (Fig 10) comme expliqué dans l’article qui suit. Consultez aussi notre foire aux questions : Bolide du 7 octobre 2021 – Foire aux Questions(1)
La vidéo intégrale de la caméra de Belfort est visible ICI
Figure 3 – Carte des témoignages visuels. Crédit : AMS/IMO/FRIPON/Vigie-Ciel
Un bolide long et lent
Ainsi que l’ont rapporté de nombreux témoins, le météore** du 7 octobre, 18h 23min TU a duré très longtemps et il était très lent ! Ce bolide* lumineux (sa magnitude était proche de -8, Figure 6) avait une vitesse d’entrée atmosphérique de 14.8 km/s et nous avons pu l’observer pendant 15 secondes (Figure 4). Les calculs réalisés à partir des vidéos du réseau FRIPON montrent qu’il est devenu lumineux à 77 km d’altitude, alors qu’il était à la verticale de Biel, au Nord-Est du lac de Neuchâtel, en Suisse (Figure 4). Il a ensuite parcouru près de 200 km en direction du Nord-Ouest (azimut d’environ 327°) avec une inclinaison d’environ 11° par rapport à l’horizontale, passant entre Belfort et Montbéliard, puis au Sud d’Épinal, pour disparaître quelques kilomètres au Sud-Est de Toul, alors qu’il était à 39 km d’altitude.
Chute possible de météorites dans la vallée de la Meuse
Il est possible d’évaluer la masse initiale d’un objet avant qu’il ne pénètre dans l’atmosphère en mesurant sa faible décélération à haute altitude, ici entre 80 et 60 km (Figure 8). Ensuite la pression aérodynamique et la chaleur de l’air qui l’environnent sont suffisantes pour faire fondre et arracher la surface de l’objet : on parle d’ablation. L’équipe FRIPON a développé un programme permettant d’ajuster un modèle d’ablation et de freinage (ligne rouge de la Figure 8). Ainsi, on peut mesurer la diminution de la masse de l’objet incident résultant de l’ablation, et donc estimer la masse finale qui aura résisté à la rentrée atmosphérique. Dans le cas du bolide du 7 octobre, les calculs donnent une masse initiale comprise entre 2 et 15 kg et une masse finale entre 1 et 6 kg. L’erreur de mesure provient principalement de ce que la forme et la densité de l’objet ne sont pas connues.
La masse finale déterminée par le calcul situe cet événement parmi les plus importants détectés par le réseau FRIPON. Cependant, la fin de la capture vidéo effectuée par la caméra de Belfort (Figure 9) montre des sursauts de luminosité qui impliquent une fragmentation très significative. Cette fragmentation se produit à 40 km d’altitude et signe la fin du vol brillant. Cela suggère que la disparition du bolide n’est pas simplement liée à son ralentissement, mais qu’il n’y a plus d’objet massif en raison de cette fragmentation. Un tel phénomène rend peu probable que l’on retrouve une météorite de plusieurs kilogrammes et évoque la chute de la météorite de Tcheliabinsk en février 2013. Cet objet, qui pesait 12 000 t lors de son entrée atmosphérique, s’est fragmenté à six reprises et l’on n’a pu retrouver au sol qu’une fraction infime de la masse initiale (< 1 t) : un unique fragment volumineux (650 kg, 70 cm de diamètre), quelques dizaines de gros fragments de 1 à 5 kg et, surtout, une myriade de petites météorites dont les plus minuscules retrouvées ne pesaient qu’un dixième de grammes (soit quelques mm en taille). Il est possible que l’objet qui a engendré le bolide du 7 octobre 2021 ait eu une destinée similaire et n’ait atteint le sol que sous la forme d’une multitude de petits fragments – plus difficiles à détecter individuellement, mais aussi très nombreux…
L’équipe FRIPON a calculé le « vol sombre » de l’objet c’est à dire sa trajectoire depuis le dernier point visible jusqu’au sol. Pour cela, il faut prendre en compte les conditions atmosphériques (vent et pression). La faible inclinaison de la trajectoire implique une zone de chute très allongée (Figure 10) qui mesure près de 100 km de long ! Les fragments les plus lourds (moins freinés) se trouveraient a l’ouest, près de Verdun, tandis que les plus légers se trouveraient plutôt à l’est.
Dans une zone de chute d’une telle taille, il est inenvisageable d’organiser des battues sur le terrain comme cela a été fait, par exemple, à Maisontiers. Mais les habitants informés et ayant appris à identifier une météorite pourraient bien débusquer un ou plusieurs fragments, comme cela s’est produit en 2020 en Italie pour la météorite de Cavezzo et, plus récemment, en Autriche avec la météorite de Kindberg. Nous proposons donc aux habitants de la région de faire attention, lorsqu’ils se déplacent, aux cailloux susceptibles de ressembler à des météorites. La figure 11 décrit les principales caractéristiques d’une météorite et une vidéo explicative sera mise en ligne très prochainement. Attention, cependant, à bien respecter la loi lors de toute recherche sur le terrain ! Cela concerne notamment les propriétés privées, la réglementation concernant l’utilisation de détecteurs de métaux et l’interdiction d’accès à certains champs de bataille de la première guerre mondiale.
Notons, enfin, que si la taille de la zone de chute possible diminue la probabilité de retrouver un fragment de la météorite, sa fragmentation sans doute importante implique que les pierres individuelles sont plus petites – donc moins visibles – mais aussi plus nombreuses. Cela signifie qu’il n’est pas impossible que l’une d’entre elles soit retrouvée, mais cette probabilité va diminuer rapidement avec le temps et deviendra quasiment nulle dans quelques mois.
Le relais régional FRIPON/Vigie-Ciel en charge de la coordination des recherches sur le terrain est la Planétarium d’Epinal.
Pour des informations plus générales sur cette chute et sur les météorites, consultez la FAQ : Bolide du 7 octobre 2021 – Foire aux Questions(1)
Figure 11 – Schéma expliquant comment reconnaître une météorite . Crédit : Fripon/Vigie-Ciel
Lexique
* un bolide est un météore** (synonyme d’étoile filante) très lumineux. On désigne généralement par bolide tout météore plus lumineux que la planète Vénus (l’astre le plus brillant du ciel après le Soleil et la Lune)
**un météore (ou étoile filante) est le trait lumineux observé lorsqu’une poussière interplanétaire ou un petit météoroïde*** pénètre dans l’atmosphère terrestre à très grande vitesse (entre 12 et 72 km/s)
***un météoroïde est une petite particule de quelques millimètres à quelques dizaines de centimètres de diamètre qui se déplace dans l’espace. C’est elle qui donne naissance au météore si elle a la chance de pénétrer dans l’atmosphère de la Terre. Si le météoroïde est suffisamment massif, une partie de l’objet peut résister à cette entrée dans l’atmosphère, et donner naissance à une météorite****
****une météorite est le caillou rocheux ou métallique qui est retrouvé sur terre, lorsqu’une partie d’un météoroïde suffisamment massif a réussi à traverser l’atmosphère et arriver au sol
[1] Stations ayant enregistré le bolide du 7 octobre, 18h 23min TU :
- FRFC02-Belfort
- FRBO06-Chatillon
- FRBO03-Glux
- FRBO01-Dijon
- FRLO02-Epinal
- FRRA05-Sutrieu
- FRAL04-Hochfelden
Dernière mise à jour : 11/10/2021, 11h30 min