Météorites normandes : bilan d’une folle semaine

Le 13 février, à 03h 59min (heure locale française), l’astéroïde 2023 CX1 pénétrait dans l’atmosphère terrestre, 7 heures après avoir été découvert. Quelques jours et de multiples calculs de trajectoires et de zones de chute plus tard, une équipe constituée de chercheurs membres du programme FRIPON/Vigie-Ciel, de passionnés et de volontaires de tous les âges se rendait sur le terrain, à proximité du village de Saint-Pierre-le-Viger, afin d’essayer de retrouver des météorites ayant survécu à l’entrée atmosphérique du petit astéroïde.

A la fin de la première journée, une première météorite était découverte par Loïs Leblanc-Rappe. Cette dernière, d’une masse supérieure à 90 g (Tableau 1), eu un retentissement impressionnant. Lors des journées et battues qui suivirent, 11 autres météorites, de masses comprises entre 2 et 24 g sont venues compléter la récolte de matière extraterrestre.

 

 

Le protocole mis en place dans le cadre du programme de sciences participatives Vigie-Ciel a été respecté : demande d’autorisations d’accès aux propriétaires des terrains, rencontre avec les autorités locales, formation des volontaires sur le terrain et, bien sûr, rappel des objectifs du projet. Cette démarche a été très appréciée par les participants et les habitants rencontrés et constitue pour l’équipe une base essentielle pour rendre ce projet possible.

Nous avons reçu de très nombreux messages sur vigie-ciel(@)mnhn.fr et aussi sur les réseaux sociaux de personnes qui ont souhaité rejoindre les équipes sur le terrain. Nous avons aussi reçu des messages de personnes qui pensent avoir trouvé une météorite liée ou non à cette chute. Nous tentons de répondre à tous ces messages à la hauteur de nos moyens humains.

Nous recevons également beaucoup de questions à propos de la zone de chute : pourquoi ne pas la publier dès les premiers calculs et indiquer aux volontaires les zones où chercher ?

Cette question est complexe et nous taraude depuis plusieurs années ! Voici les deux principaux sujets de débat :

– La zone de chute que l’on calcule dépend de beaucoup de paramètres qui ne sont pas connus, tels que la masse et la forme initiale de l’objet avant sa rencontre avec l’atmosphère terrestre. Elle a été calculée par plusieurs équipes internationales et publiée par plusieurs sources indépendantes avant d’être totalement stabilisée. Les résultats ont ensuite été précisés au fur et à mesure et ont fait l’objet de plusieurs débats scientifiques pendant que les équipes étaient déjà sur le terrain, car nous savions qu’il fallait être réactif. Citer les noms des communes concernées et inviter les habitants à être vigilants nous a semblé la meilleure option, car nous avons toujours considéré qu’une chute de météorites concernait avant tout les habitants de la région concernée.

– Dans le cadre du projet de sciences participatives Vigie-Ciel et après plusieurs expériences sur le terrain, nous avons souhaité favoriser les recherches groupées plutôt que des recherches individuelles. Ces recherches répondent à plusieurs objectifs et sont sous-tendues par des valeurs partagées. Tout d’abord, nous souhaitons retrouver les météorites et, pour cela, faciliter les accès aux terrains en faisant des demandes d’autorisations communes afin d’éviter de déranger les habitants par des visites intempestives. Par ailleurs, au cœur du projet Vigie-Ciel se trouve la volonté de partager une quête commune, de permettre aux professionnels, amateurs et aux curieux de se rencontrer et aussi de former sur le terrain à la reconnaissance de météorites.  Ces éléments favorisent la confiance mutuelle, une valeur essentielle dans les programmes de sciences participatives et dont le bénéfice va bien au delà de la récupération de météorites.

 

Dans un souci de transparence, nous publions aujourd’hui la carte des trouvailles en insistant sur différentes précautions qui nous paraissent essentielles pour celles et ceux qui voudraient participer à cette quête : 1/ privilégier une participation aux recherches groupées en contactant l’équipe FRIPON/Vigie-Ciel : vigie-ciel(@)mnhn.fr ; 2/ ne jamais aller sur des terrains sans l’autorisation des propriétaires ni utiliser de détecteurs de métaux, leur utilisation étant très réglementée et non indispensable en cas de chute récente ; 3/ en cas de trouvaille, contacter l’équipe pour valider et partager la découverte. Nous rappelons que notre objectif ultime est de confier ces objets qui constituent des biens communs à des institutions de recherche et de conservation, afin d’améliorer nos connaissances sur la formation du Système solaire et qu’ils soient transmis à travers les générations.

 

 

 

L’histoire continue ! Actuellement, la météorite retrouvée par Loïs Leblanc-Rappe est à Bratislava dans un détecteur  (du Département de Physique Nucléaire de l’Université Komensky) pour le comptage des noyaux cosmogéniques. Cela va nous renseigner sur la durée du voyage interplanétaire de l’astéroïde 2023 CX1 et sur sa géométrie au moment où il a impacté l’atmosphère de la Terre. Nous pourrons alors comparer ces données aux observations télescopiques faites dans les heures qui ont précédé la chute. En parallèle, deux petites préparations faites pour les études microscopiques vont être caractérisées au Muséum de Vienne et au Muséum national d’Histoire naturelle. Cela permettra de déterminer le type de météorite d’ici quelques jours, et de nombreuses analyses complémentaires seront menées dans les semaines à venir, afin de caractériser 2023 CX1. En parallèle, une nouvelle campagne de recherches de météorites a débuté !

Un grand merci à tou.te.s les participant.e.s et aux habitant.e.s de Saint-Pierre-Le-Viger, d’Angiens et des communes limitrophes pour leur accueil et pour tous les moments de partage !

A suivre…..